{JEU ONLINE} ARCHIVES DE L'ABBAYE SAINT-ARNVALD DE NOIRLAC, MERE DE L'ORDRE CISTERCIEN FORUM D'ARCHIVES DE L'ORDRE CISTERCIEN, RELIE AU JEU ONLINE LES ROYAUMES RENAISSANTS. |
|
| Visite d'une jeune fille | |
| | Auteur | Message |
---|
uriel Défunt/Fantôme
Nombre de messages : 7843 Date d'inscription : 27/01/2009
| Sujet: Visite d'une jeune fille Mar 2 Aoû - 18:26 | |
| Le Frère théologien permit donc à la jeune fille de passer les portes et l'emmena vers les jardins. Il passa par le cloître, endroit complètement fermé vers l'extérieur, hormis la cour, qui ne permettait, finalement, que de regarder le ciel, là où l'esprit de l'humain ne pouvait que contempler Dieu. Passant enfin une autre porte, ils débouchèrent dans une allée, un peu à l'ombre d'une chapelle, de part et d'autre de la sente, l'on pouvait voir un certain nombre de "simples", allant des herbes aromatiques aux fameuses plantes utilisées pour des cataplasmes et des tisanes afin de soigner les malades.
Un petit banc de pierre avait été monté sous un prunier, lequel donnait encore quelques fruits, tardivement. Uriel invita la jeune fille à s'y asseoir, si elle le souhaitait.
Ainsi donc ... vous êtes la fille d'Anna ?
Dit-il en souriant.
J'ignorais que notre soeur viticultrice avait eu des enfants ; elle paraissait encore si jeune.
Nous voici donc, en ces lieux, qui ont accueilli votre mère de nombreux mois ; nous la regrettons tous énormément ...
Il soupira, se rappelant de la perte tragique et de la douleur qui en avait découlé. | |
| | | clarrissia Sacristain
Nombre de messages : 142 Age : 28 résidence ds les RR : Saint-Claude Date d'inscription : 01/08/2011
| Sujet: Re: Visite d'une jeune fille Mer 3 Aoû - 6:15 | |
| Clarri suivit le père Uriel. De porte en porte ils débouchèrent sur une allée où exhalaient des senteurs aromatiques identiques à celles qu'elle humait auparavant chez l'apothicaire de son village. Une petite chapelle permettait aux promeneurs de s'abriter du chaud soleil d'été. Le père Uriel l'invita à s'asseoir sur un banc de pierre où un prunier projetait ses branches pour assurer une candide protection.
Levant les yeux, la jeune fille ne put réprimer un petit rire. Des prunes minuscules ornaient de ci de là les branches du fruitier.
- Hi hi, elles sont petites vos prunes. Mais je ne doute pas qu'elles soient très bonnes. Chez nous, on les appellent des " bazergades ", ce sont des prunes sauvages de forme ovoïde, très grosses et très sucrées. Il faudra que je vous en ramène un jour...mais je ne sais pas quand je pourrais revenir chez nous. Enfin, l'avenir nous le dira.
Puis lorsque père Uriel d'une manière entendue se rendit compte à haute voix que la jeune fille était bien la fille d'Anna, elle le regarda et reprit.
- Oui, je suis la fille d'Anna. Clarrissia Van Ansel. Je voulais rencontrer quelqu'un de cette abbaye non pas pour apprendre les circonstances du décès de ma mère, je les connais. Quelqu'un est venu m'informer de ce qui s'était passé. Un oncle que je n'avais jamais vu jusqu'alors, le frère aîné de maman. Non, je suis venue pour vous parler de ma mère, vous raconter ce qui fut sa vie et comment elle avait vécu jusqu'à ces terribles instants. Je suis heureuse que cela soit vous qui m'ayez accueillie. Uriel...père Uriel...prince Uriel...oui c'était bien cela, prince Uriel. Lorsque vous vous êtes présenté à Moi à Rome, j'ai fouillé dans ma mémoire ; votre nom ne m'était pas inconnu. Alors j'ai cherché et j'ai trouvé. Tous les effets et parchemins de ma mère m'ont été rendus et je peux vous dire que cela a rempli pas moins de trois malles ! Incroyable ce qu'elle a pu écrire. Et parmi tous ses vélins j'ai enfin découvert un article qu'elle avait écrit sur Vous. Ma mère ne faisait de mal à personne, elle condamnait la bêtise, la méchanceté et l'injustice, mais elle encensait très peu.
Elle se tourne alors vers le père et plonge ses yeux noirs dans les siens.
- Il a fallu que vous ayez réalisé de bien belles choses pour qu'elle se permette de coucher sur papier de si jolies et nobles phrases à votre intention.
Elle se tut un instant. Dégagea de sa besace une outre et en proposa au père Uriel.
- C'est de l'eau avec un peu de réglisse. On l'emploie comme calmant de la toux et pour éclaircir la voix. Hi hi, je vais en avoir besoin, avec tout ce que j'ai à vous dire ! Chez nous on l'appelle " Coco ", c'est très rafraîchissant.
Ses idées étaient maintenant bien en place, elle fit une pause en s'imprégnant des essences du jardin. Etrange comme elle se sentait bien ici. Elle comprit alors les longues absences de sa mère.
Dernière édition par clarrissia le Mer 3 Aoû - 10:01, édité 2 fois | |
| | | clarrissia Sacristain
Nombre de messages : 142 Age : 28 résidence ds les RR : Saint-Claude Date d'inscription : 01/08/2011
| Sujet: Re: Visite d'une jeune fille Mer 3 Aoû - 9:54 | |
| Elle se pencha en arrière et s'adossa contre le tronc du prunier. Puis les yeux dans le lointain elle entreprit son récit...
" Nous venons d'un pays où les hommes de la terre n'avaient rien, pas même de nom. Ils n'étaient rien, naissaient et mourraient sans laisser plus de traces que le souffle court du vent dans le maquis.
Au temps fort lointain, l'un des nôtres put acquérir une brebis, d'où son fils eut un couple, son petit-fils un troupeau et son arrière petit-fils prit le nom qui est le nom de notre race maintenant. Ils dérobaient au sommeil du temps, afin de travailler pour eux, tandis que les belles heures ensoleillées n'appartenaient qu'au fief du Seigneur des lieux. Nos brebis s'accommodant de la traite aux deux bouts de la nuit, les serfs que nous étions purent amasser de quoi acheter au seigneur une partie d'eux-mêmes ; ainsi les fils de la lignée moutonnière naquirent vilains...La fabrication des fromages, les soustraire sournoisement à l'envie : et mes ancêtres sont passés à travers les guerres, ce qui leur permit d'acquérir un pan de caillasse au flanc de la montagne. Ils suèrent sang et eau pour briser le granit et transformer les cailloux en gravier. Ils travaillèrent ainsi sans relâche, nourrissant leur seigneur et se serrant la panse pour faire la terre de leurs mains et la hausser en traversiers afin d'y semer des châtaigniers, des plans de vigne tout en lisant Aristote à livre ouvert."
Clarrissia s'accorde une pause puis reprend...
" ... Puis vint le siècle où mon grand-père dut défendre son bien contre la paresse et l'avidité perfide de certains, où il souffrit pour son...Aristote, pour les siens, pour son mas, pour son nom.
Voilà Sire...et de la lignée de notre race il n'en survit plus un seul. Les derniers nous sommes, exilés en Franche-Comté, nus dans la tempête, blessés quelque part. Nous nous sommes démenés de notre mieux toutefois pour que notre vie que l'on estime malgré tout, nous fut gardée. Ma mère n'eut même pas à persuader ses frères pour quitter notre île et aucun d'eux n'eut un seul mot contre elle, c'était à qui ajouterait à sa figure une vertu qu'elle oublia, à sa mémoire un bienfait qu'elle ignora...Imladris, mon oncle que je n'avais point connu jusqu'à ces tristes évènements a par la suite réalisé un travail de titan paraît-il et c'est grâce à lui que nous sommes ce que nous sommes devenus."
Elle respire profondément et s'accorde une pause. Boit un peu d'eau de réglisse et ferme ses yeux. Restait à aborder le cas de sa tendre maman... | |
| | | uriel Défunt/Fantôme
Nombre de messages : 7843 Date d'inscription : 27/01/2009
| Sujet: Re: Visite d'une jeune fille Jeu 4 Aoû - 7:44 | |
| Installés sur un banc de pierre dans le jardin, entre la sauge et la camomille, l'atmosphère était des plus paisibles. Parfois un moine venait chercher quelques plantes pour une quelconque préparation ou onguent. Un léger vent d'été s'était mis à souffler, rappelant que la belle saison était à son apogée, que bientôt les champs de blés seraient fauchés, couchant leurs épis d'or.
A chaque région ses bienfaits. Il ne faut cependant point trop en abuser, de ces prunes, quelques moines gourmands en ont fait les frais en passant justement quelque temps au frais ...
En Lorraine, ces fruits sont déclinés en mirabelles, vous devriez voir comme ces arbres, plantés en immenses vergers s'ornent de blanc et passent ensuite au jaune avec leurs fruits, telles de minuscules pommes d'or du jardin des Hespérides. Le jour viendra sans doute où vos pas vous porteront à nouveau vers Kallyste.
Il nota mentalement ce nom de "bazgarde" puis écouta l'histoire de la jeune fille. Il rosit alors à la mention du "Prince".
Je suis heureux que les parchemins d'Anna vous soient parvenus, mon épouse Sybille en avait gardé une partie, des copies, sans doute. Vous savez ... je n'ai pas fait grand chose pour mériter ce titre, je ne suis au final qu'un simple et humble homme, rien de plus. Je n'ai fait que ce que mon coeur dictait, et ce sans chercher à en retirer un quelconque avantage ou à m'en glorifier.
Votre mère était une femme remarquable, tantôt douce, parfois un peu emportée contre la stupidité des humains mais toujours avec un coeur énorme. Son défaut a été de trop faire confiance et croire en l'humain. La plupart d'entre eux sont des personnes correctes et de bonne foi, mais il se trouve toujours qu'il y a une pomme pour pourrir le panier ou encore une brebis galeuse pour décimer le troupeau. Anna a eu la malchance d'en rentrer une, à Dole.
Il serra les dents, à nouveau. Cette perte tragique, mais surtout l'excommunication qui en avait découlé le dégoûtait et avait irrémédiablement entamé sa confiance dans les institutions de l’Église ... on jugeait quelqu'un pour avoir eu quelques gestes tandis qu'on tolérait que des prélats usent et abusent ... la justice d’Église ne ballait pas mieux que celles des hommes, elle était, elle aussi, à deux vitesses. Levant un sourcil face à cette boisson "coco", il la huma en premier lieu avant de s'en humecter les lèvres.
C'est vraiment très bon, il faudra que j'y repense.
Puis il l'écouta raconter l'histoire de sa famille, la jeune fille avait hérité de ce don pour les raconter. Une fois encore, il avait l'insigne honneur et le privilège de laisser ses sens vagabonder, transportés par les sons, tandis que des images fugaces et sans doute irréelles naissaient dans son esprit ...
Vous avez vraiment le don pour conter. N'ayez crainte cependant, même si vous êtes seuls dans la tempête, le calme reviendra et vous aborderez sur une plage luxurieuse, où il fera bon souffler un instant. Eau et fruits pousseront en abondance et si vous ne les trouvez pas par vous même, des guides seront là pour vous montrer les sentes à parcourir.
Le clerc sourit à nouveau, se voulant rassurant pour la jeune fille ; là où d'autres auraient lâché cela sans y prendre garde, lui avait la conviction de ce qu'il avançait.
| |
| | | clarrissia Sacristain
Nombre de messages : 142 Age : 28 résidence ds les RR : Saint-Claude Date d'inscription : 01/08/2011
| Sujet: Re: Visite d'une jeune fille Ven 5 Aoû - 8:07 | |
| Clarrissia ria de bon coeur lorsque le père Uriel lui expliqua que certains moines étaient victimes du péché de gourmandise, un bien compréhensible péché malgré tout. Puis elle l'écouta attentivement parler de la Lorraine et de sa spécialité : la mirabelle. La description bucolique qu'il en fit la fit rêver, elle ne manquerait pas d'aller voir les vergers au printemps parés de leurs couleurs. Il fit ensuite l'éloge de sa mère. Apparemment l'affection entre le père Uriel et sa maman semblait réciproque...
La transition était toute trouvée pour qu'elle dévoile la vie de celle qui lui manquait.
" Je ne la voyais pas souvent. A Noël, pour mon anniversaire et quelquefois en me faisant la surprise de sa venue. Pour mon plus grand plaisir. Elle m'avait placé chez des personnes de haute tenue, nobles mais très simples, n'ayant pas dévié d'un pouce l'éducation que maman voulait que j'assimile. Qu'est ce qu'elle était belle maman ! Plus je grandissais, plus je la trouvais jolie, les années ne semblaient avoir aucune prise sur elle. Elle dégageait une sérénité qui me coupait le souffle. Un calme apparent qui lui donnait une certaine classe...
Vous savez, tout le monde et surtout ceux qui paraissent le plus d'aplomb sur cette terre ont besoin du giron maternel de temps en temps pour réchauffer leur coeur. Et c'est quand leur mère a gagné le droit d'aller au paradis solaire qu'ils sont vraiment sevrés. les gens ils n'ont plus rien à quoi s'accrocher, alors ils deviennent mauvais. Il y a en eux des cris qui fermentent et qui pourrissent. Un feu qui s'éteint doucement en dégageant une sale fumée. l'enfance voyez-vous c'est un mal dont on ne peut jamais guérir. On vous appelle des adultes, mais vous n'êtes au fond que des petits enfants vous comprenez ? Oui vous me comprenez. mais certains ne comprennent pas, c'est sans doute que eux sont peut-être devenus des adultes pour de vrai. Y'a pas de mal à ça, il faut de tout pour défaire un monde...
Ma mère c'était la statue vivante d'un amour bafoué. Et je suis le fruit de cet amour bafoué mais je n'ai jamais été aimée à l'emporte-pièce. Quand je lui posais des questions sur mon père, elle l'appelait " ton géniteur "...alors je n'ai guère insisté et je ne chercherais pas à savoir qui il est. J'ai tellement de clameurs d'infini dans la poitrine, j'imagine certaines nuits les cris silencieux de maman qui l'étouffent...ouais, on croit que les portes restent ouvertes mais ce n'est pas vrai ; elles se referment parce-qu'elles sont faites pour ça. Ouvertes c'est fugitif. Fermées c'est leur finalité. La porte de ma mère s'est refermée sur moi. Alors parfois je pose mes mains sur le bois de la porte et je colle mon oreille ; j'espère qu'elle me voit...je coltine mes langueurs...cela aurait pu être ça n'a pas été ; tant pis."
Une pause...elle cherche ses mots, car elle va aborder une période difficile pour elle.
" Je sais ce qu'elle était, elle ne s'en est jamais cachée, elle a eu la force de ne rien dissimuler et a été honnête avec elle-même ; ce n'est pas donné à tout le monde. Tout ce qu'elle demandait c'était quelqu'un qui l'écoute, elle exprimait seulement la demande essentielle de tout être humain, celle d'une écoute bienveillante et disponible. Savoir que l'on a la parole en partage comme les philosophes nous l'ont appris de longue date. La belle affaire si on ne peut plus partager une réflexion avec personne et si nul ne consent à l'entendre pour ce qu'elle veut dire. l'important il me semble est moins la capacité de la parole que la possibilité d'ouvrir par elle des chemins vers d'autres à même de comprendre. le plus important n'est pas tant d'être en mesure de parler, il est de rencontrer une présence attentive et disponible à ce qui veut se dire de la difficulté de vivre ce que l'on est.
Mon frère, vous savez sans doute que maman a été dénoncée par une personne de très mauvaise foi n'ayant nullement assisté aux faits qui ont lui ont été reprochés. Elle voulait seulement faire une parodie de mariage, un simulacre. Simplement pour mettre un peu d'animation dans une ville qui se meurt...enfin, c'est ainsi. Mais ce que vous ne savez pas, c'est que la personne délatrice a eu le culot, la bassesse et l'horrible affront d'avoir à titre posthume délivré une médaille à son encontre pour je cite : " services rendus à cette bonne vieille ville de Dole " ! J'en ai pleuré de rage et de colère, et je crois que maman doit pleurer également mais de pitié pour cette personne fourbe, pleine de fausse commisération qui fait le charme des vieilles morues dessalées. Je ne la connais pas mais je l'imagine très bien, vouée au crêpe noir, petite de classe, en boule contre la moitié de l'humanité et pleurant des larmes de crocodile sur l'autre moitié. L'éternelle insatisfaite dans toute sa tristesse, serrant les mains comme si elle présentait des condoléances, toujours en rogne, faite pour apprendre des morts et pour noyer les petits chats de sa voisine, faisant la toilette des cadavres d'amis plus souvent que la leur, sentant la tristesse et la férocité, écoutant aux portes, à l'affût de la moindre rumeur, arrivant sur la pointe des pieds pour surprendre les médisances la concernant ; et je vous parie ce que vous voulez, que si il lui arrive d'assister à une partie de soule, lorsque les joueurs sont empêtrés les uns aux autres, qu'elle est convaincue que ces mêmes joueurs parlent d'elle au creux de leur viril essaim.
Ouais, ce sont les bouffeuses de joie de notre civilisation..."
Alors Clarri et son coeur trop tendre se met à chialer doucement, sans douleur, sans véritable chagrin. parce-qu'elle a obscurément conscience de la stupidité de la vie et de sa trajectoire insensée.
" Vous savez mon père, depuis que maman est morte je pense chaque jour à elle et j'essaie de comprendre pourquoi elle a lâché prise en effectuant cet acte horrible de se donner la mort. Et plus le temps s'écoule, plus je me dis qu'elle n'en voulait pas à cet évêque inquisiteur venu l'interroger. Qu'aurait-elle risqué après tout ? D'être défroquée ? Mais dites-moi, elle aimait tellement cette abbaye, sa vie se serait poursuivie ici non ? En qualité de simple paysanne pour l'entretien des vignes n'est-ce-pas ? Non, je crois qu'elle a été déçue et s'est désespérée du comportement des Dolois. Comme vous dites elle a ramené une pomme pourrie dans son panier et cette pomme a tout contaminé. Leur indifférence...surtout ne pas parler, se taire, ne pas prendre parti. Que l'on ne me raconte pas d'histoires ! le spectacle d'une femme en grande souffrance et cherchant des yeux un peu d'aide n'empêche pas grand monde de continuer à ripailler, mais je vous pose la question mon père, peut-on être vraiment heureux en restant indifférent au malheur des autres ?
Elle a dû être tellement épuisée qu'elle n'a pas eu la force de les chialer. Quand on a plus de force on devient fataliste, parce-que la réalité quand on vous la met devant les yeux, ça calme. Alors elle a dû vivre un grand moment d'épuisement, elle a dû penser à la mort comme un plat de rognons braisés ; c'était son mets préféré hi hi... Elle a rêvé au calme, au repos, à la lumière et se demander pourquoi finalement accorder quelque importance à ce qu'on pense être un grand évènement : l'Humanité. Plus rien ne devait exister pour elle en ce jour fatal, même moi. Elle devait vraiment ressentir un épuisement formidable pour que disparaisse de son âme toute essence humaine... Finalement, la gloire, l'amour, l'argent, les honneurs ; ce ne sont que les composants d'une horrible mascarade."
Clarrissia se tut, elle en avait terminé. Elle regarda ce bon père Uriel en souriant, puis soudain lui dit.
- Je crois que je vais faire ma pastorale, ici même. ma mère aurait voulu que je sois baptisée, mais elle me disait toujours : " Laissons s'épanouir les nouvelles branches avant de détruire les vieilles racines, il ne sert à rien de baptiser les petits enfants car il faut qu'ils comprennent ce à quoi ils vont adhérer ; si c'est pour se faire baptiser et ne plus prier cela ne sert à rien, d'où l'intérêt d'une pastorale pour bien saisir ce à quoi on s'engage." Alors je vais aller de ce pas voir ce cher frère portier dont j'ai très mal interprété les gestes je l'avoue, mais j'irais le voir pour me faire pardonner, et je vais m'inscrire pour étudier ma pastorale. En attendant vous ne verriez aucun inconvénient que je puisse aller visiter vos vignes si jolies dont maman disait tant de bien ? Et puis, sans vouloir abuser, pourriez-vous m'indiquer le chemin pour me rendre à l'endroit où repose sa dépouille ? J'aimerais boucler la boucle à tout jamais.
Vous êtes bon mon père, merci d'avoir consacré un peu de votre temps pour m'écouter. Maman vous aimait beaucoup, ainsi que tous les membres de cette abbaye. Vraiment.
Elle se leva, le salua fort respectueusement et laissa errer son regard sur les belles allées fleuries. Un peu plus loin elle crut voir le frère portier en train de porter soin à de magnifiques roses. Une occasion d'aller le voir pour faire amende honorable. Puis posant ses yeux à nouveau sur le père Uriel elle se baissa et déposa une bise rapide sur sa joue.
- Pardon mon père, mais vous le méritez bien. | |
| | | uriel Défunt/Fantôme
Nombre de messages : 7843 Date d'inscription : 27/01/2009
| Sujet: Re: Visite d'une jeune fille Ven 5 Aoû - 15:29 | |
| La mécanique céleste semblait se ralentir dans ce petit jardin ; les rouages du temps avaient plus de difficulté à se mouvoir tellement la vie ici était paisible. Qui pouvait dire qu'à l'extérieur de ces murs il y avait parfois tant de vilénie, de tromperie et de perversion. Uriel apprit la vie de Clarissa et en même temps celle d'Anna, probablement était-il un des seuls à être privilégié que la jeune fille s'épanche sur son adolescence ; à sa grande habitude, il écoutait de manière neutre - pragmatique, presque - ne laissant son esprit formuler aucun jugement de par les éléments fournis.Elle vous aimait tendrement, à n'en point douter. Certes - sans vouloir critiquer et encore moins vouloir émettre un quelconque jugement - elle n'a peut-être pas eu l'opportunité de vous serrer assez dans ses bras et de vous dire combien elle était fière de vous, mais je suis sûr qu'au fond de son coeur, c'était le cas.
Quant à la majorité des adultes, jeune Clarissa, ce sont ceux qui ont enfermé leurs derniers rêves au fond d'un coffre et ont définitivement oublié où ils ont mis la clé, ayant remisé tout cela dans un autre temps qu'ils appellent "le passé. Prêts à "affronter la vie", ils se battent avec elle pour s'extraire du lot, marquer la postérité ou encore se faire un nom, sans se rendre compte que le temps altère leur jugement et l’orgueil dépose sur eux le poids de la vieillesse. Vanité, tout n'est que vanité ... Ils se réveillent un matin, vieux, et ne sont plus que des coques vides, n'ayant au final accédé qu'à ce que l'ombre leur avait suggéré et voyant devant leurs pas l'abîme de noirceur qu'ils ont creusés. Prêts à tomber en dedans, ils réalisent alors la futilité de leur vie et sont bien vite oubliés une fois froidement allongés comme des cadavres ... et ainsi passe la gloire du Monde ... Il y en a qui gardent en leur coeur un morceau d'arc-en-ciel de l'enfance, celui dont est fait le Paradis. Ces personnes ne semblent pas être touchées par le temps, ni par les velléités et encore moins par les futilités que leur jette en pâture l'existence. Mais parfois, il se trouve que la dague empoisonnée des premiers vient flétrir le reste d'espoir qu'il restait aux second et l'espace d'un instant, ces couleurs chatoyantes deviennent mornes et grises ; délavées, elles emportent avec elles la promesse d'un avenir ensoleillé ... Je pense que c'est ce qui est arrivé à Anna ... déçue, affectée par ceux et celles qui l'avaient côtoyé chaque journée ... il n'y a pas de blessure plus profonde que celle de la confiance trahie.
Oui j'ai connu ce vers quoi le coeur de votre mère penchait. Qui sont les hommes pour juger ce qu'est l'Amour ? Dieu nous gratifia de ce Don, seul Lui peut le comprendre comment est l'Amour, il ne nous revient pas de le codifier et de le ramener à notre esprit qui est parfois bien étroit. Une fois encore ce sont ces gens qui se croient l'égal du Très-Haut et s'arrogent Son pouvoir de décider qui peut ou non aller au Paradis Solaire.Il posa alors la main sur son avant bras, alors qu'il voyait les larmes couler sur son visage.Mais n'ayez crainte, chère enfant, je suis persuadé que votre mère repose aujourd'hui près d'Aristote et de Christos. Dieu ne saurait être injuste.Il hocha la tête gravement à ses paroles.Notre monde, Clarissa, est en majeure partie composé de personnes qui ne sont tournées que vers elles-mêmes plutôt que vers les autres. J'ai croisé des gens qui mangeaient dans des assiettes en or, tandis que les personnes à côté d'elles avaient peine à trouver un quignon de pain. J'ai connu des nobles qui habitaient dans des hôtels débordant d'un luxe dégoûtant alors que des gueux dormaient sous une fine étoffe trouée, dans la neige. Nous vivons là où la misère côtoie le plus grand luxe ; certains arrivent à résister à tout cela, mais bien peu nombreux est leur peuple ...Uriel soupira - combien de fois n'avait-il pas vu cela ? Certes, il était mal placé pour en parlé, lui, noble de sang et de titres, arborant un blason qui était coloré comme un arbre de noël ; ses couronnes, si il les avait porté - et encore eût-il fallu qu'il se souvient où il les avait négligemment jeté - lui auraient brisé la nuque tellement elles étaient nombreuses. De tous ces biens matériels, il n'avait que faire, ses actions étaient ailleurs : ouvrir la voie du Paradis à ceux qu'il croisait, peu lui importait de le faire en habits tissés d'or fin ou en guenilles ... Le clerc sourit lorsqu'elle lui parla de sa pastorale ...je vais me charger de votre éducation religieuse, alors, si vous le souhaitez ... ... quant à la tombe d'Anna, je vous y emmènerai, nous emprunterons le chemin [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien], et je vous laisserai aller vous recueillir [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien], seule, au calme.Non qu'il ne désira pas accompagner la jeune fille jusqu'à la lisière du bois, mais il respecterait sa solitude et sa possible envie de parler à ce qu'il restait de sa mère. Se levant, également, il fut surpris de la bise reçue de la jeune fille et la serra tout aristotéliciennement contre lui.Il n'y a pas à me remercier, c'est moi qui doit le faire pour m'avoir ouvert votre coeur et votre âme. | |
| | | clarrissia Sacristain
Nombre de messages : 142 Age : 28 résidence ds les RR : Saint-Claude Date d'inscription : 01/08/2011
| Sujet: Re: Visite d'une jeune fille Sam 6 Aoû - 16:47 | |
| Clarrissia avait dévoré les paroles du père Uriel. Elle en resta bouche-bée un long instant, puis se ressaisissant elle s'agenouilla devant lui et lui dit.
- Non ! Surtout ne me demandez pas de me relever, je tiens à vous dire ceci : à chacune des visites de ma mère, celle-ci me parlait de vous, de votre charisme, de votre foy, de votre bonté, de votre grandeur, de votre générosité. Elle m'a parlé de votre pèlerinage pour sauver la ville de Nancy, vous ne vous êtes jamais plaint, vous avez quémandé de l'aide pour sauver de pauvres gens et pour sauver une ville de la ruine et de la destruction.
Hé oui, l’être humain est égoïste, serait-ce une façon de se protéger ? Possible, le problème est que beaucoup en pâtissent. C'est vrai que vous êtes un être exceptionnel et ne dites pas le contraire. Vous êtes humble, modeste et c'est ce qui fait toute votre grandeur d'âme, vous nourrissez un idéal de paix, de fraternité et d’ouverture aux autres, vous avez choisi de dire non à l'obscurantisme et vous apprenez aux gens à exister. On m'a dit souvent sans gêne ni scrupules, qu’il fallait oublier pour avancer, et lorsque je vous écoute, j'ai l'impression d'entendre la voix de ma mère, " ces personnes là ne pourront jamais ressentir ce que l'on ressent, de la magnificence de la vie, du bien que l'on se fait en le procurant aux autres..."ma mère était une référence, un repère pour moi, je vous demande de prendre sa suite, oui, vous me conseillerez dans mes choix et dans mes études, car je désire être comme vous... Je veux mener un combat juste, celui de la générosité, de la fraternité, celui d'une jeune fille honnête et humaniste.
Elle baisse la tête et embrasse les mains du père Uriel. Sa mère n’a jamais été aussi présente qu'en cet instant.
- Restez bien en vie mon père, je ferais en sorte que le flambeau d'égalité que vous avez allumé ne se consume point.
Puis elle se releva, lui sourit et prit les plans où elle pourrait se recueillir sur la tombe de sa mère ainsi que le plan des vignobles.
- Merci pour tout, c'est bizarre mon père, tout d'un coup je me sens plus sereine. Mais ne seriez-vous pas un véritable démon ?
Elle rit. Elle rit comme une enfant de son âge. Son entretien avec le père Uriel avait été bénéfique. Elle grandissait trop vite à son goût, et retrouver les valeurs de son âge la comblaient de joie.
| |
| | | uriel Défunt/Fantôme
Nombre de messages : 7843 Date d'inscription : 27/01/2009
| Sujet: Re: Visite d'une jeune fille Dim 7 Aoû - 6:47 | |
| Voyant la jeune fille s'agenouiller, il eut un mouvement en sa direction pour la faire se relever.
Non ! Surtout ne me demandez pas de me relever
Il s'interrompit mais s'accroupit à son tour, ne souhaitant pas être supérieur à quiconque, quel qu'il ou elle fut. Il sourit à la jeune fille.
J'allais le faire, mais dans ce cas, je vais venir vous rejoindre. Je ne mérite aucune dévotion, je ne suis qu'un homme, je vous l'ai dit. Je me reconnais bien en vos paroles, en toute humilité. Sans doute sont-ce ces qualités chez moi qui ont suscité l'intérêt d'Anna.
Vous devez avoir raison. Être égoïste, c'est se protéger ; ne pas laisser à l'autre l'occasion de voir ce qu'il pourrait interpréter comme une faiblesse.. Je suis un idéaliste et un utopiste.
Uriel écouta alors ses paroles, et loin d'être insensible, une boule se noua dans sa gorge. Non, décidément, il n'avait aucun regret d'avoir prélevé le coeur d'Anna pour aller le placer en terre consacrée. Sans doute révèlerait-il cela à la jeune fille, un jour, lorsque le temps serait venu.
Je suis honoré par vos paroles Clarissa ; je vous guiderai dans vos choix et sera là pour vous le temps que le destin m'accordera. Et dans ce combat que vous souhaitez mener, je serai à vos côtés.
Ils se relevèrent alors.
Tant qu'il restera ce genre de flamme dans les coeurs, ma fille, notre monde ne sera pas perdu.
Levant alors un sourcil, il rit avec elle.
Un démon ! Que Dieu m'en garde !! Je vous laisse aller vous recueillir ; si vous avez besoin de moi à votre retour, je serai là. | |
| | | Contenu sponsorisé
| Sujet: Re: Visite d'une jeune fille | |
| |
| | | | Visite d'une jeune fille | |
|
Sujets similaires | |
|
| Permission de ce forum: | Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
| |
| |
| |
|