[RP] Discussion sur Christos autour d'un verre de lait

Oblate Nombre de messages : 1215 Date d'inscription : 13/05/2010

Après avoir accueilli Guillaume à l'entrée de l'Abbaye, Eilinn l'avait mené jusqu'au réfectoire, désert à cette heure.

Installe-toi donc, je vais te chercher un verre de lait.

Si ses souvenirs étaient bons, c'était la boisson fétiche du petit garçon. Eilinn disparut un instant dans la cuisine de l'Abbaye, avant de ramener sur un plateau une cruche de lait frais, du vin largement coupé d'eau, du pain, du fromage, du miel ainsi que de la confiture des fruits de l'abbaye, ainsi que des gobelets. Elle installa le tout devant le petit garçon et se servit pour elle du vin allongé, ainsi que du pain et du fromage. A l'âge de l'adolescence, la sœur cuisinière n'avait aucun scrupule à manger lorsqu'elle en ressentait le besoin, même si elle restait désespérément maigre et sans formes féminines. Elle servit dans un gobelet du lait, qu'elle avança vers Guillaume.

Alors dis-moi, tu n'as pas eu de problème sur la route ? Ce n'est pas très prudent de voyager tout seul...

Obéissant bien sagement, le gamin s'installa comme indiqué et patienta un moment. Il observait de loin la grande salle, vide, n'osant pas se rapprocher et visiter de lui-même. De ceux qui l'avaient déjà vu auparavant, cela pouvait quelques peut surprendre. L'enfant n'avait jamais montré aucune gêne pour faire ce qu'il désirait, lorsqu'il le désirait. Mais les règles, il savait les appliquer dans les maisons du Très Haut, ce n'était plus là un lieu de jeu, mais d'apprentissage et de méditation. Du moins s'y essayait-il le plus souvent.

Au retour de celle qui l'avait accueillie, il lui fit un grand sourire, qui resta jusqu'à ce que la dernière goutte de lait eut atteinte le verre qui serait le sien. Et dans un « merci » prononcé le récipient touchant déjà ses lèvres, il avala de bonne gorgée de lait.

« Aucun problème damoiselle soeur moinillone, lui dit-il une fois le verre posé sur la table. Puis, il continua sur le ton de l'évidence. Vous savez, le Très Haut me protège et personne ne semble vouloir d'un petit enfant. » S'approchant de la jeune femme, il lui chuchota quelques mots. « Ils ne savent pas encore que je serais le futur Pape. »

Oblate Nombre de messages : 1215 Date d'inscription : 13/05/2010

Eilinn eut un sourire à la réponse du petit garçon. Certains voulaient être chevaliers, d'autres troubadours, lui c'était Pape, chacun son style !

Oh, un futur Pape ! Rien que cela !

Eilinn se servit du vin coupé d'eau, qu'elle but avec parcimonie. Il serait bien temps au long de la conversation de se restaurer un peu.

J'espère sincèrement que tu y arriveras !

Autant ne pas briser l'élan de la jeunesse.

Alors dis-moi, notre conversation à Tours remonte à quelques temps déjà, tu voulais que nous parlions du second Livre, celui sur Christos je crois. Qu'est ce que tu as lu déjà ?

Loin de saisir encore parfaitement l'ironie, même s'il savait parfois en user, le gamin eut un moment de réflexion et d’hésitation, ne comprenant pas réellement son interlocutrice. « Euh... Ça fait trop peu ? Il faut que j'en rajoute avec ? » D'un sourire, il se lâchât dans ses folles ambitions et projet d'avenir. « Je pensais à Empereur aussi. Pape et Empereur de tout le monde aristotélicien. Je ferais et déferais les Rois et Princes, pour la plus grande gloire du Très Haut, notre Créateur. » Un hochement de tête, convaincu par ses paroles, puis il prit une seconde fois son verre de lait pour en boire entièrement le contenu. Le simple fait qu'il n'en fit pas de même dès la première fois relevait de l'exploit.

« J'ai lu le Livre, moi. » Insistant bien sur le dernier mot, il semblait bien préciser que son interlocutrice n'en avait certainement pas fait de même. Ses souvenirs étant encore frais, il pouvait repenser aux erreurs qu'elle avait commises. « Mais dedans, il parle d'un Christos sans dire vraiment qui il est. Seulement un prophète. Je ne le connais pas, moi. Il vient de nulle part. » C'est qu'à force de lecture, le gamin commençait clairement à douter des qualités d’écriture de celui, ou ceux, qui avaient produit ce livre. Ou, en seconde hypothèse, remettre en cause les moines copistes qui en auraient oublié de nombreuses pages.

Oblate Nombre de messages : 1215 Date d'inscription : 13/05/2010

Eilinn sourit et ne voulut pas défaire les rêves de l'enfant.

Je reviens, donne moi un instant.

Eilinn sortit des cuisines et alla chercher à la bibliothèque un exemplaire des deux Livres saints. Elle déposa sur la table du réfectoire avec tout le respect qui leur était du les deux ouvrages, et les montra à Guillaume.

Tu as lu le Premier Livre du Dogme, mais il en existe un second, que l'on appelle le Duo Prophétique. Dedans, on y décrit la vita d'Aristote, et celle de Christos, qui sont les deux prophètes de l'Aristotélisme.

Eilinn ouvrit le second livre et présenta quelques enluminures.

Ces deux livres ensemble constituent le dogme aristotélicien, auquel on peut aussi ajouter les hagiographies et quelques textes.
Que sais-tu donc d'Aristote, déjà ?

Un sourire, et le voilà abandonnés. Seul face à cette nourriture déposée là, innocente, ne demandant qu'à être délicatement enfournée dans la bouche du mini-moine. Torture ! Mais il lui fallut résister. La gourmandise n’était pas elle-même bien décrite dans Le Livre, comme l'un des principaux péchés ? Le simple fait de finir dans la Lune et d’être ainsi observer puis conter dans les livres pour humains lui déplaisait fortement. Et pourtant...

Il n'avait pas spécialement faim. Même si le voyage fut long et quelques fois bien rude, il avait toujours trouvé de quoi manger, un minimum, sans que jamais il n’eût à employer des méthodes malhonnêtes. Hormis peut-être braver quelques règles, se servant seul et sans autorisation dans les forets d'autres seigneurs. Non, il n'avait pas particulièrement faim. Mais le pain et le fromage laisser ainsi sur la table ne cessaient de l'appeler, réclamant une mort digne, dans un estomac. Comment résister ? Comment aurait-il pu, lui, le garçon légèrement grassouillet qui se plaisait à tout avaler.

Elle revint finalement, un nouveau livre en main. Étonnamment, le garçon n'osait plus réellement bouger, la face figée pour ne rien trahir, se contentant d’écouter la moinillone. Il hocha la tête par moment, indiquant son approbation ou sa compréhension. Mais dans son enthousiasme débordant, il oublia bien vite les quelques minutes précédentes. S'il avait réussi à résister à l'envie de questionner sur ce qu’était la « hagiographie », il ne put en faire de même pour son envie de réponse. Il ouvrit la bouche, une fois encore. « Che chonnais pas chrand chose. Prophète, chage... »

Puis il se tut, simplement. Pendant l'espace d'un instant, il essaya de croire que ce n’était là que l’œuvre de son imagination, et que la demoiselle face à lui n'avait rien remarqué. Son vol de bout de pain et de fromage pouvait être révélé. Guillaume se pressa donc d'avaler le tout, comme il venait, n’hésitant pas à prendre le risque de s'en étouffer pour que rien n'en paraisse ouvertement. « Sage. Il a reçu la parole du Créateur et l'a enseignée aux hommes. » Ainsi continuait-il, comme si rien ne s’était passé.

Oblate Nombre de messages : 1215 Date d'inscription : 13/05/2010

Il n'y eut qu'un léger sourire de la soeur cuisinière devant la bouche pleine de l'enfant. Tout comme la môme Josselinière le savait, n'étant pas généreuse dans ses formes, Eilinn l'était dans sa discrète prévenance et sa tendance maladive à nourrir les autres.
Ainsi ne s'offusqua-t-elle pas du machouillage de fromage, après tout, si elle l'avait servi, c'était bien pour qu'il mange. Et on était loin de l'ambiance studieuse des cellules de St Benoit.

Aristote est l'incarnation de la Raison dans le mythe aristotélicien. En complément, Christos est celle du Cœur, de la pratique de l'Aristotélisme et de la Vertu.

Eilinn passa quelques pages, montrant les enluminures.

Aristote était grec. Très vite, il comprit qu'il ne pouvait pas y avoir plusieurs dieux, et conclut qu'un seul dieu existait. Il devint le disciple de Platon, mais ils avaient beaucoup d'idées opposées. Aristote pensait notamment que l'homme devait participer à la vie de la cité, la politique par exemple. Il devint ensuite le précepteur d'un grand Empereur, Alexandre le Grand. Il dut fuir la ville qu'il aimait à la mort de son Empereur, et il eut une triste fin.

Eilinn patienta un instant pour voir si Guillaume avait tout compris.

Grec ?! Le mot lui fit marquer une grande expression d’étonnement. C'est qu'il avait déjà eu l'occasion d'entendre cela et d'en avoir une définition assez détaillée pour son jeune âgé. Quelques semaines en Anjou, suivit de près par celle qui avait pris temporairement en charge l’éducation du gamin, et ce simple mot pouvait avoir un tout autre sens.

Il n'entendait plus qu'à moitié les paroles de la moinillone. Le mot l'avait plongé totalement dans ses pensées, essayant de comprendre comment un grec pouvait être sage et prophète. Pourquoi, parmi tous les hommes de ce monde, le divin avait préféré choisir un grec. Une personne qui n'agit même pas selon ses principes.
« Platon », « Empereurs Alexandre » c’était donc là ses amants ? Allant jusqu'à un empereur ? Berk ! Trois fois berk ! Guillaume en aurait presque rejeté son repas, par dégout de la chose et du produit de son imagination. Seule la pensée de l'effort intense qu'il lui avait fallu pour tout avaler repoussa cette scène immonde.

Dans ce court moment de silence, maintenant présenté à lui, l'enfant y glissa sa petite question. « Comment un homme, qui n'aime pas les femmes, peut être la Raison ? » Le fait de prononcer cela de vive voix releva chez lui une autre question qu'il se garda d'exprimer. Le Padré Bender aimait aussi se jouer de la naïveté du mini-moine, la jeune femme n'en faisait-elle pas là de même ?

Oblate Nombre de messages : 1215 Date d'inscription : 13/05/2010

Eilinn voyait s'afficher sur le visage de l'enfant une grande perplexité. A la question qu'il posa, inattendue et hors de propos concernant un prophète aristotélicien, Eilinn haussa un sourcil en guise de surprise.

Qu'est ce que tu me racontes ?
Il n'y a rien dans le Livre qui concerne ce genre de choses sur Aristote !

Soit l'enfant avait de drôles d'idées, soit on lui avait fait une blague. Eilinn leva les yeux au ciel, décidement l'enseignement lescurien était en dessous de tout.

Pourquoi penses-tu qu'Aristote n'aimait pas les femmes ? Il dispensait son enseignement à chacun, ne prenant en compte ni l'origine sociale, le sexe, ou la couleur de cheveux... Il incarne le Logos, ce qu'on appelle, qu'on peut traduire par la "Raison", l'intelligence. Dieu aime chacun de ses fidèles de la même manière, il accepte lorsque les brebis égarés reviennent dans le troupeau, il prodigue son pardon à ceux qui se repentent.

Eilinn savait que certains hommes partageaient des idées rétrogrades concernant le statut féminin, peut-être que l'enfant avait eu un précepteur avec ce genre d'idées.

Il écouta, toujours, mais il n'en avait pas fini pour autant. Guillaume se pressa donc, une fois que la jeune femme en eut terminé, de répliquer en toute hâte avant qu'elle ne puisse avoir le temps d'y ajouter la moindre phrase.

« Mais vous aviez dit qu'il était grec ! » Ne connaissait-elle pas les grecs ? Rien ne lui paraissait impossible, la moinillone avait aussi beaucoup de défauts dans ses connaissances, comme beaucoup de grands. Pour une presque grande, elle n'en faisait pas exception. « S'il est grec, il aime pas les femmes. » Il haussait de nouveau les épaules, pensant ne dévoiler là que pure évidence, comme dire que le soleil était jaune. « Ils se marient avec les hommes, les grecs. »

Oblate Nombre de messages : 1215 Date d'inscription : 13/05/2010

Il y eut un froncement de sourcils de la part d'Eilinn. Visiblement,elle semblait se demander ce que l'enfant racontait, n'ayant jamais entendu parler de telles sornettes chez les grecs. De surcroit, le mariage entre personnes du même sexe étaient interdites, ainsi il lui était inconcevable d'imaginer la contrée d'Aristote comme siège de pratiques sodomites et contre-nature.

Balivernes que voilà ! Bien sur que les grecs aiment les femmes ! Si ils ne se mariaient qu'entre hommes, ils ne pourraient pas avoir de descendance, et les grecs auraient alors disparu depuis longtemps de notre monde... Cesse donc là ces billevesées mon enfant, celui qui t'a enseigné cela devait avoir un esprit bien tordu ou inspiré par le Sans Nom ou Lucifer...

Eilinn leva les yeux au ciel en se demandant ce qui pouvait bien avoir poussé un homme d'église à raconter des idioties à un esprit naïf.

On continue ou pas ?

Guillaume fut surpris par la réaction. Pour la première fois depuis bien longtemps, une personne avait su lui répondre avec autorité, du moins il le prit ainsi. D'ordinaire, comme avec le Père Curé Bender, il se serait amusé à tenir tête, allant même jusqu'à envenimer la situation. Mais le ton employé lui indiqua poliment qu'il été préférable de ne pas s'y risquer.

D'une faible voix à peine audible, le gamin tenta de se justifier. « Mais l'Excellence à dit que... » Puis, se souvenant des dernières paroles de la jeune femme, se tut simplement. Il savait son ancienne "tutrice" peu fidèle et ne souhaitait surtout pas lui apporter plus d'ennui en la dénonçant ici. Il ne serait sans doute jamais Pape si elle se finissait sur le bucher, par sa simple faute.

Il se contenta de hausser les épaules et d'accepter les propos tenus, se promettant de ne plus jamais revenir sur le sujet, avec quiconque. À la dernière question, il y répondit tout timidement. « Euh... oui, bien sûr. » Il se força dans un sourire, essayant de faire comme si rien ne s’était passé et surtout réussir à se détendre.

« Quelle triste fin ? » Il questionna maintenant, reprenant le sujet et fil de la conversation.

Oblate Nombre de messages : 1215 Date d'inscription : 13/05/2010

Finalement l'enfant se décidait à enfin arrêter ses bêtises.

Oh, il fut obligé de fuir Athènes à la mort de son protecteur, Alexandre le Grand. Ses opposants s'en prirent à sa famille, et il partit pour une autre cité grecque. Mais il était déjà bien vieux, et sa santé déclina rapidement.
Ce fut une amphore de vin empoisonnée, apporté par un esclave d'Athènes, qui l'acheva. Mais avant sa mort, il eut le temps de préparer l'arrivée de Christos, en chargeant son fils de transmettre sa parole à travers les peuples.

Tu as des questions ?

La question était dangereuse pour la moinillone. Sans doute inconsciente par son manque de connaissance, il ne fallait jamais dire de telle chose a cet enfant, car des questions il en avait toujours et par milliers. Pour commencer, il n'avait pas compris la moitié des mots de ces quelques phrases. Comment aurait-il pu connaitre Athènes, l'amphore, ou encore cet Alexandre. Quoique pour ce dernier, il était toujours aussi fier qu'il soit Empereur, pouvant ainsi se convaincre de faire le même « métier ».

Il chercha des yeux un autre morceau de pain ou une quelconque cruche de lait. Seul élément pouvant le détourner de son désir de poser les questions. Car, au vu de la réception reçue lors de la précédente posée, il n'avait aucune envie de recommencer. Guillaume regarda alors la jeune femme, comme pour demander l'autorisation sans prononcer le moindre mot, puis prit l’initiative de se servir seul en lait et pain. Surtout en lait.

Durant ce court service, où il en renversa tout logiquement de tout coté, stratagème fut trouvé. Évitant de poser une question direct, il contourna par une phrase simple. « J'aimerais beaucoup lire ce livre. » C'est qu'il devenait presque bon à ce petit jeu, l’éducation angevine portait ses fruits.

Oblate Nombre de messages : 1215 Date d'inscription : 13/05/2010

Ahh ! Attention voyons !

Eilinn se leva pour aller prendre un chiffon et éponger le lait renversé par Guillaume. Une fois ceci fait, et assurée que la table n'était plus trop humide, elle se réinstalla pour verser un verre de lait à Guillaume.

Tu en voudrais un exemplaire ? Cela doit pouvoir se faire je pense. Nous passerons au scriptorium tout à l'heure, pour voir si tu peux en prendre un.

Il existait bien des versions sans enluminures richissimes pour les curés de campagne, et qui pourraient résister aux mains maladroites de l'enfant.

Il haussa les épaules. Le gamin ne comprenait pas vraiment la réaction. « C'est pas ma faute » s'excusa-t-il alors, bien convaincu que la table avait bougé toute seule pour le faire verser a coté. Pour s'aider a se convaincre, il alla jusqu'à imaginer l’œuvre du Sans-Nom, celui qui ne veux pas de lui en Pape et empêcher tout ses projets. Oui, pour le gamin c’était chose certaine, la bête lui en voulait.

Une fois nettoyer, le lait vint toutefois, et c’était là le plus important pour le moment. Alors, la discussion concerna de nouveau le livre. « Oui, je veux ! » dit-il sur un ton légèrement exigeant. « Je le lirais tous les jours. » Inutile, il est vrai, de rappeler à la moinillone qu'il ne savait pas lire. Après une gorgée de lait, il s’étira de son maximum et eut un bâillement tel, que l'ont aurait pu croire qu'il allait s'en détacher la mâchoire.

Oblate Nombre de messages : 1215 Date d'inscription : 13/05/2010

Eilinn avait oublié depuis un bon moment que Guillaume ne savait pas lire, vu que de toute façon, il avait réussi à venir ici en lisant son papier. Elle fronça les sourcils en le voyant bailler. Il était vrai qu'elle ne pouvait pas exiger de lui autant d'endurance qu'un séminariste.

Veux-tu que je te raconte l'histoire de Christos, ou tu préfères aller faire une sieste ? Il doit bien y avoir des cellules libres dans l'abbaye.

Guillaume se sentit un peu offensé par les paroles, pourtant pleines de bonne volonté et de politesse, de la Sœur. Il ne se sentait pas faible, et pensait qu'en futur Pape, il se devait bien de pouvoir rester éveillé même après ce long voyage. Puis un Pape ne devait-il pas connaître toutes ces histoires ? Non décidément, il n'allait pas laisser croire qu'il n’était un petit enfant. « Je suis grand. Je veux écouter l'histoire de Sieur Christos. » Les paroles, les envies, cependant, ne traduisaient pas réellement les réactions de son corps. Un nouveau bâillement se fit apercevoir, même s'il tenta plus fortement de le réprimer.

Oblate Nombre de messages : 1215 Date d'inscription : 13/05/2010

La soeur cuisinière hocha la tête. Les enfants étaient têtus, d'ailleurs n'en était-elle pas une encore parfois ?

A ton aise.

Et si il s'endormait, quelle importance après tout ? La table du réfectoire ne serait guère agréable comme oreiller, mais ne disait-on pas que nécessité faisait loi. Eilinn reprit le Livre des Vertus, et prit un instant pour aller à la partie sur la Vita de Christos.

Christos était l'enfant de deux miséreux, Maria et Giosep. Dieu désigna leur futur enfant comme l'élu du Très Haut, qui aura comme tâche d'enseigner la sagesse d'Aristote. L'enfant naquit neuf mois plus tard, et il était si serein, si rayonnant, que les gens de son village lui prodiguait tout ce qui était nécessaire pour vivre.
Très vite il y eut des jaloux, et il dut fuir avec ses parents dans une petite île. Puis les années passèrent, et ils revinrent dans leur pays, pour que s'accomplisse la prophétie.

Eilinn tournait les pages lentement.

Il devint un homme, et commença à prêcher. Il résista aux tentations du Sans Nom, et recruta ses disciples, ou ses apôtres comme on les appelle aussi. Avec eux, il créa l'Eglise Aristotélicienne, et posa les piliers de notre religion.

Mais un de ses apôtres le trahit, et il fut condamné à mort. On le cloua sur une immense croix, et il mourut après avoir enduré mille tortures. A cet instant, la tempête s'abattit sur ses meurtriers, comme pour les punir. Et enfin, le ciel s'ouvrit, les anges apparurent alors pour emmener le corps du prophète au Paradis Solaire.

Eilinn vérifia si Guillaume s'était endormi.

Guillaume commença par poser ses bras sur la table de bois massif. Aussi grande qu'elle fût, elle n'avait aucun mal à l’accueillir. Puis, sa lourde tête vint les rejoindre, trouvant là un petit nid douillet, ou y ressemblant de peu. Le gamin avait alors tout loisir d'observer la damoiselle et d’écouter l'histoire qui lui était contée. Alors, vers la moitié du récit, une bataille avec ses yeux perturba sa concentration. Les mots prononcés lui étaient plus lointains, moins audibles. Il lui fallut toute cette énergie pour éviter de fermer ses yeux, ou les rouvrir lorsqu'il échouait.

Il était si fier de lui, souriant pour saluer son courage et ses exploits. Il voulait rester éveillé, aussi longtemps que l'histoire lui sera racontée. Mais le voyage fut bien trop éprouvant pour l'enfant, il avait besoin de bien plus de repos que ses aînés, bien plus d’énergie pour seulement arriver à se concentrer. Alors, comment résister face a cette envie de sommeil, à ce « lit » tout trouvé bien aussi confortable que sa cellule lescurienne, et ce conte qui l'invitait doucement à rejoindre le royaume des rêves. Bien trop faible, il ne pouvait pas. Et c'est sans s'en apercevoir, que le mini-mone s’était endormi, murmurant un « Merci. » avant d'entreprendre de légers ronflements.

» Discussion privé autour d'un repas
» [Dogme] Livre des Vertus II - La Vita de Christos
» [Mémoire] Arghun : résumé de la Vita de Christos