Poussière, tout n'était que poussière... L'homme arriva, les traits tirés et le visage maculé d'une fine pellicule blanchâtre sillonée de quelques traces grises coulant de ses yeux. Sous la grisaille de ses vêtements, on distinguait quelques taches de vinasse et les reliefs de repas pris en marchant qui avaient décoloré son bliaut usagé. Ses braies humidifiées par la rosée du matin lui collaient au corps tandis que ses chausses fatiguées retenaient un baillement grâce à une ficelle les liant à ses pieds.
il frotta vigoureusement sa face tiraillée de sommeil, fourragea dans ses cheveux chassant les brins d'herbe et la terre, souvenirs de sa nuit à la belle étoile. Regardant tristement ses frusques, il se mit en devoir d'en chasser la poussière à grand renfort de claques soulevant un petit nuage poussièreux flottant autour de lui tel une aura toujours en mouvement.
S'étant rendu, à peu de choses près selon ses critères, présentable, il parcouru les derniers mètres qui le séparaient de la lourde porte de bois et secoua le heurtoir à plusieurs reprises, espérant ne pas réveiller le frère portier ou le déranger dans ses prières...
Grandstef, attendant patiemment une réponse, repensait aux raisons de sa venue... Perdant peu à peu sa foi dans les hommes et les femmes de son entourage, il avait besoin d'une grande bolée de ferveur aritotélicienne et de suivre quelque séminaire qui lui permettrait de renouer confiance en ses frères et soeurs de la grande croyance. De plus sa raison lui commandait de laisser le temps faire son oeuvre. La religion l'avait toujours transporté, il se rappelait encore avec quelle force il chantait les cantiques au sein de sa paroisse et comme les paroles divines distillées par le prêtre résonnaient en lui comme un tintement de cloche apportant paix et sérénité...